Hymnes

Il me semble que la plus belle satisfaction qu’un éleveur puisse avoir est d’être parmi son troupeau tout en se sachant aimé.

Lorsque j’étais adolescent, en choisissant mon orientation agricole, on m’a dit que je valais “mieux que ça”.
Quand j’étais en lycée agricole, je n’osais même pas parler de ce qui me tenait à coeur car ces idéologies faisaient la risée des professeurs.
La première fois que j’ai parlé d’un souhait d’installation agricole, c’était en face d’un conseiller agricole qui m’humilia gentiment devant mon frère.
Lorsque j’ai demandé de l’aide à un conseiller agricole bio, il me répondit une semaine avant la CDOA que mon projet n’était pas viable.
Quand nous avons été voir les banques, le gentilhomme nous a préconisé d’avoir, en plus du travail de la ferme, un CDI chacun.
Lorsque j’ai réservé le troupeau de Highland Cattle, l’importateur m’a fait observé que “maintenant va falloir assurer”
Juste avant que l’on s’installe, une voisine éleveuse, m’a pris de haut en me certifiant que je ne ferai jamais de bons chiffres.

Puis, comme par magie, depuis que nous sommes installés,
Le chef du département de l’ASP nous félicite en nous disant que nous avons une “ferme exemplaire” !
Notre contrôleur bio nous certifie que nous avons à ses yeux “un élevage d’avenir” !
Un technicien CIVAM et CEDAPA nous indique que sur les centaines de fermes qu’il a visité, nous avons “le troupeau le plus calme et docile” !
Une conseillère bio nous félicite la main sur l’épaule “votre élevage fait rêver” !
Une comportementaliste animale nous dit que notre troupeau nous suivrait “au bout du monde” !
Un communiquant naturaliste n’en revient toujours pas !
Et notre banquier nous indique que notre élevage ressemble à celui de son père et qu’il “ne s’en fait pas pour nous !”

Quant à nous, aux porteurs de projets, on vous certifie :
Lâchez rien ! 💪
Croyez en vous ! ⭐️
N’écoutez que vous ! 💝
Faites ce qu’il faut ! 🦹‍♂️
Tout est possible ! 🙏
Vous en êtes capables ! 🥰
Vous y arriverez ! 🏁

⭐️ Car même dans vos plus beaux rêves, vous êtes à mille lieux d’imaginer ce qui vous attend ⭐️

Il faisait froid ce jour là. Le ciel était couvert mais le soleil parvenait à percer de-ci de-là.
Je partis à l’étable nourrir “la bande à Sineag”.
“Salut les Loulous ! Bonjour Lorna, Sco, bonjour ! Sylvaine, Mokoc’h…” Tout allait au mieux. Certaines étaient allongées, d’autres ruminaient, pendant que Mokoc’h jouait à slalomer entre tout ce beau monde.
Soudain, je vis Bygül, le chat si réputé de notre gîte, il était revenu !! Parti il y a de ça huit semaines, nous l’avions même pleuré, dans le mélodrame de l’hiver. Mais il était revenu ! Gros câlin, gros ronron … échange de bons procédés…
Mon téléphone sonna : “C’est nous, vous êtes où ?”
La journée s’annonçait relativement complexe, on avait demandé des renforts ; mon père qui depuis sa retraite s’est transformé en paysan-cowboy-pâtissier-écrivain et ma mère, venue la main sur le coeur passer un agréable moment.
“Rejoignez nous à la maison, on va y aller !”
Bises, sourires, gestes d’attention, annonce des bonnes nouvelles et préparation de l’organisation de la journée.
“On va changer de place aux repro pour les rapprocher du champ du couloir de contention, on fera leurs prophy mercredi !”
Il y avait environ 1 km à parcourir ; du plat à travers les bois, une énorme montée de 300 m puis une longue descente sur route goudronnée.
Vous savez, j’ai beaucoup marché avec mes Highlands, devant surtout, prenant des selfies en mode relax ou la langue dehors en mode sprint … généralement suivant la motivation d’Oscar qui mène la danse. Ce changement de champ est de loin le plus difficile car si on marche, éleveurs et bovins, au même rythme sur la montée, la descente venue, une pause serait la bienvenue pour nos deux jambes alors qu’à quatre pattes, c’est le moment où le sprint commence…
Et ce changement de champ, je l’ai souvent fait sans relais … je vous laisse imaginer … mais toujours devant, pas le choix…
Nous voilà partis à tout préparer. Aucune tangente n’est permise, le risque peut être grand.
“On va faire un relais ; Wendy ira devant jusqu’en haut de la côte, papa fermant la marche. Au sommet, j’irai devant et vous suivrez derrière.”
Voilà Wendy et mon père partis chercher nos “pignoufes” en mode je donne de la voix…
Je dis à ma mère, en les attendant : “Tu peux venir devant avec moi si tu veux, tu vois.”
SMS : “On y va”
Petite discussion agréable entre un fils et sa maman, confession, échanges de sourires … et voilà des voix qui se rapprochent au loin puis tout près “Viens viens ! Viens viens !”
Wendy se mit de côté pour pouvoir reprendre son souffle. Caileag, “ma grosse Zonzon” suivait. A mon tour “Viens viens !!” Mais tout le monde s’arrêta. Il n’y avait plus de guide ; j’étais trop loin. Alors par la distance et par la pensée, je créais le lien et hop galop !!!
Je vis ma mère tomber. Mais elle était proche du talus, loin des pas des bovins. “Reste là, ne bouge plus !”
Les pas se rapprochaient de moi, j’accélérais. Puis se rapprochaient encore… Bon, garçon, aujourd’hui c’est mode turbo ! Je courrais le plus vite que je pouvais et à l’oreille, interprétait mon éloignement au peloton… Patacloppatacloppatacloppataclop… Je me disais que le champ d’arrivée n’était plus si loin. Dans ces sprints, tout est bon pour se donner de la force. Je jetais de l’aliment de mon seau au sol pour les faire ralentir, mais rien à faire ; patacloppatacloppataclop… “Tiens bon”, je me disais, “reste devant”
Le champ d’arrivée était collé aux broutards, cette bande d’une vingtaine de jeunes. Je ne sais pas s’ils riaient ou m’encourageaient mais ils avaient l’air passionnés de nous voir tous en mode on met le paquet…
Puis j’arrivais. Si Carl Lewis lève les bras à l’arrivée, moi, je n’en avais plus la force. Lily Rose d’un coup de cornes me fit comprendre de me décaler avant de me reposer.
Je me retournais vers elles “Merci … Merci … Merci … Bravo … Génial … Tu es belle …” Je me dis qu’acheter un quad serait vraiment approprié la prochaine fois mais le budget ne le permet pas, tant pis…
Laluinn, la trainarde, arriva avec mon père et Wendy. Ma mère m’avait rejoint depuis plusieurs minutes déjà. Laluinn était si loin des autres que je dus partir la chercher car elle ne trouvait plus sa route. Pousser une vache est une chose, l’orienter est une autre. Ma mère surveillait le troupeau et nous ouvrit la porte.
A tout travail une récompense, mon père avait préparé d’excellents gâteaux. On les mangea parmi le troupeau repro. Si mon père excelle en beaucoup de domaines, le surnom de “papy gâteaux” lui va à merveille…
Wendy partit soigner les zigotos. Je restais avec mes parents donner de l’eau, monter le parc pour les prophylaxies des jeunes prévue demain et protéger l’arbre qui avait symbolisé le règne végétal à notre mariage.
Wendy, qui était passée par l’étable pour chercher des affaires, m’appela “Sineag a vêlé !!! Il est louvet, c’est un mâle, tout va bien !”
Si ma joie fut grande de le voir pour la première fois, c’est avec un immense soulagement mêlé à une gratitude sans limite que je crus voir un bison blanc à quelques pas de là … car pour tout amoureux de la nature, la venue d’un bison blanc est un honneur absolu.
“Tout ira bien, on t’a assez testé comme ça” entendis je dans mes profondeurs. Le bison blanc, lui, se contenta d’un clin d’oeil.
La nuit tombée, j’allais voir Sineag et Siliniez. J’eus encore une fois une autre surprise puisque Lorna avait elle aussi vêlé ! Sudz, dieu slave du destin et de la gloire, était né !
Et alors que Wendy et Bygül dormaient, je donnais le colostrum au nouveau né.
“Va dormir en paix” murmura Sineag.
“Je lui donnerai mon lait et ferai sa toilette” me confia Lorna.
Lorsqu’on sillonne notre société par ses débats, ses manifestations, ses représentations, ses informations, ses sujets de controverse, il est fréquent, oppressant, déplorable, déprimant voire scandaleux que de constater qu’ici et là toutes les sonnettes d’alarme semblent résonner en poussant un cri d’alerte n’ayant comme nuances une fumée nauséabonde symbole de notre drame du XXIème siècle ; la crise environnementale et son porte drapeau le réchauffement climatique.
Aussi, à une autre échelle, chacun d’entre nous, humains, s’émerveille tantôt de ce qui le rendra le plus beau, le plus célèbre, le plus in, loin de la réalité de ce qui semble pénétrer le plus touchant des comportements humains ; la joie de contempler qui on est réellement.
C’est ainsi très ambigüe, très déroutant que de se faire sa place dans ce monde, appelé ici à réaliser cela et coincer d’un autre côté à se restreindre à ceci.
Je suis convaincu que ce qui coince le plus dans toutes ces attractions et ces distractions est de savoir avec motivation, véracité et aboutissement à une des grandes questions philosophiques ; Qui suis-je ?
A cela, d’un point de vue dit terre à terre, je vous répondrai que l’on est qui l’on souhaite être. Nous sommes libres de notre image intérieure et extérieure, dénués de toutes restrictions, de tous symboles, de toutes majestés, libres comme un caméléon qui choisirait son plus bel uniforme ou dégagé de tout lien du ressentiment voire de sa propre façade. D’un point de vu purement objectif, notre image est fondée sur nos modèles, sur nos mœurs, mais également sur nos habitudes, nos abjections, nos peurs, notre vécu et nos folies.
Il y a de quoi bien de poiler en observant en chacun d’entre nous notre diplomatie interne visant à toujours plus de plus et à bien cacher dans les vieux placards de la cave de notre habitat les fondements de notre existence propre ; notre propre nature, la nature de l’être vivant que nous sommes ici bas, j’ai nommé le mammifère si intelligent, intelligible et si doué que nous sommes mais également le douteux sournois égocentrique qui nous habite tous.
Et ainsi, face à ses troubles intérieurs, nous constatons d’apparents signes apocalyptiques extérieurs. Simple d’esprit serait celui qui n’y verrait qu’une coïncidence. Le monde semble ainsi être à notre image et perdurer dans une façade lointaine des conquistadors, vers l’ouest, ou une planète lointaine qui nous sauverait tous.
Tout cela, à mon avis, s’il a un sens, dénote de sérieuses remises en question à élaborer afin de retrouver un réel équilibre qui fera écho à l’intégration de son soi dans ce vaste univers. Si la voie que parait prendre l’Homme est abracadabrante, solvable et entretiendrait un avenir serin avec les autres espèces dans un réel souci de cohabitation paisible, le chemin le plus court est à la porté de tous.
En effet, observant la nature et observant ce qui compose les entrelacs de mon esprit, j’y dénote de fortes similitudes.
Un soir, j’ai eut écrit le poème suivant :
“Lorsque j’écoute Neil Young, je suis la mélodie qui m’élève
Quand j’alimente le feu, je suis la chaleur qui m’assoupit
Si je bois un verre d’eau, je suis la douceur qui me vivifie
Au moment où je regarde mon chat, je suis la tendresse qui nous unit
Chaque fois que je parle, je suis l’intention que j’y apporte
A l’instant où je vous écris, je suis la bienveillance que je vous transmets
Et tandis que je rêve, je suis le héros que je languis”
Je constate ainsi que quoi que je fasse, quoi que je dise et quoi que je pense, je reconnais en chaque instant la nature véritable de moi-même ; mon appartenance au monde que je construis et qui me construit en retour.
Ainsi, selon mes observations, l’alléluia de mes recherches, de ma conscience et du petit monde que je construis ici avec ma famille et mes amies cornues ne serait en réalité qu’une reconnexion intègre de ma vision au monde naturel régit par les lois de la vie ; c’est à dire de se reconnaître non plus comme un homme coupé du monde mais bien comme le monde habillé dans un costume de corps humain.
Il me semble alors et finalement qu’à partir de cela, tout peut commencer car tout devient possible.
Mais observant qu’il en a toujours été ainsi, je n’ai plus qu’à remercier mes précieuses amies cornues, tous ces êtres qui me connecte et vous qui entretenez ce lien à deux sens dans une volonté de réussir. Car c’est bien ensemble que l’on va le plus loin. Et il me semble bien qu’on est sur le même chemin.
Et ceux qui veulent se joindre à nous et créer une connexion avec nos Highland et notre nature préservée, z’êtes les bienvenu-es !
A bien observer le comportement de nos troupeaux ainsi que de ceux que je peux admirer lorsque nous nous promenons, j’en retire une leçon, une recette.
Voici maintenant plus de cinq ans que nous élevons des Highland Cattle, race réputée “dangereuse et sauvage” par beaucoup. A vrai dire, il semblerait bien qu’on ne peut identifier tel trait de caractère ou telle caractéristique intrinsèque uniquement au facteur race.
Et il me parait de plus en plus cohérent d’affirmer que les comportements des animaux domestiques et semi-domestiques sont avant tout liés au facteur éleveur lui-même.
Mais ce n’est pas aussi simple que ça.
En effet, réside en toute personne une grande force qui peut également cacher quelques lacunes qu’il convient de libérer afin de parfaire et de permettre une harmonie, une cohésion dans la relation animal-éleveur.
A cela, il faut tout d’abord bien saisir le bovin en lui-même, qu’il s’agisse de son gabarit, de son histoire mais également de ses facultés d’adaptation et d’améliorations émotionnelles.
Tout d’abord, en ce qui concerne le gabarit d’un bovin, il semble tout à fait saugrenu que d’imaginer pouvoir, par la force, pouvoir triompher face à un bovin pesant de 10 à 20 fois son poids sans que l’un ou l’autre ne soit perdant.
Et je n’ai jamais aimé cette idée qu’à tout prix lors d’un partenariat, un se devait d’être gagnant et l’autre perdant.
Car je suis convaincu et je constate que l’harmonie née lorsque l’hostilité prend fin.
Ainsi, pour imager ce lien étroit, j’aime prendre l’exemple de cet art martial qu’est le tai chi. Au sein de celui-ci, on nous apprend qu’à une force yang, une force yin doit être mise en place pour retrouver l’harmonie, la paix. Et qu’ainsi deux forces identiques finissent par ne créer que le chaos.
Et c’est dans cette optique que nous avons, ici, développé une approche douce, calme, bienveillante et toujours ouverte afin de permettre à l’ensemble de notre unité qu’est notre ferme d’avancer vers une forte cohérence.
Pour beaucoup, il existe des clichés, des stéréotypes très ancrés qui nous font croire qu’être éleveur est avant tout un métier d’homme -et des plus viriles- mais également ceux qui prétendent que tous les taureaux sont fortement hostiles et que par exemple, on entend souvent dire “qu’il ne faut jamais lui tourner le dos.”
A mon sens, tout cela est faux. Et je rajouterai que le comportement d’un taureau dépend avant tout des liens passés éleveur-bovin. Et qu’ainsi, si un bovin devient ingérable, c’est qu’il ne s’est pas senti respecté ou reconnu à un certain moment. Et que c’est très souvent le cas. Lorsque j’observe des bovins, je lis en eux les comportements de l’éleveur. Vous savez, si les animaux viennent d’être reconnus comme “êtres sensibles”, il convient impérativement de bien comprendre cette sensibilité, de la considérer et de la prendre en compte lors des interactions pratiques.
A mon sens, les animaux domestiques et semi-domestiques sont si bienveillants qu’ils agissent, subtilement certes mais de manière altruiste et importante, envers l’Homme afin de permettre un équilibre et une harmonie globale.
Ainsi, tout devrait être mis en oeuvre pour parfaire cette générosité et de permettre, ensemble, une cohésion mutuelle.
Par exemple, saluer ses bovins à chaque entrée dans leur champ devrait se généraliser. Et dans cette même optique, il serait courtois et honnête de les remercier, au lieu de les traiter, uniquement, comme de la marchandise. Car cela est grave, indécent, honteux et triste.
Il me semble ainsi que le sort des agriculteurs s’améliorera grandement lorsqu’ils sauront exprimer leur gratitude et leur reconnaissance. Et que de manière globale, l’agriculture se portera mieux lorsque les Hommes sauront remercier la Terre qui les nourrit.
Avec la Nature, c’est avec son coeur qu’il faut interagir. Tout le reste n’a, à mon avis, que peu de sens. Et il est grand temps que tous, nous admettions cela. Car à un moment donné, tout Homme dans sa vie doit reconnaitre que la souffrance a assez duré alors que face à tout phénomène, il est toujours possible soit de créer d’avantage de bonheurs ou de laisser la souffrance passée perdurer. C’est encore et toujours une question de choix et de volonté.
Lorsqu’on observe le monde tel que certains souhaitent nous le montrer, beaucoup tombent dans un désespoir. Il s’installe souvent une sorte de mélancolie, un mélodrame où l’avenir des générations futures serait mis en péril et où le peuple semblerait à la fois spectateur et impuissant de tout ce désarroi.
A cela, je tiens à juxtaposer une toute autre vision.
Car si la majorité des médias français appartiennent à des groupes dont les enjeux principaux ne sont pas de proposer des pistes de paix et d’ententes entre les peuples, il convient alors de proposer à tout à chacun une vision neutre et épanouie du monde dans lequel nous nous trouvons. Cela permettra alors, je pense, d’y trouver d’avantage d’équilibre personnel, de percevoir une harmonie globale et de fixer en priorité un avenir composé de valeurs qui ont réellement un sens pour l’ensemble des composantes de la vie sur Terre, qu’ils soient à deux pieds, à quatre pattes, à plumes, à écailles, rampants et végétaux, visibles ou non.
La vie est composée d’un équilibre précieux à maintenir. En cela elle est parfaite. Et il convient d’oser freiner l’orgueil et la vanité de certains qui par unique soif du gain remettent ces équilibres sous des airs basculants.
Mais ces derniers m’indiffèrent. Car mes valeurs sont toutes autres et que j’ai choisi une toute autre voie. Celle-ci m’a été apprise, par mes expériences, par clairvoyance et grâce à ma détermination de toujours choisir, non pas le chemin le plus facile mais, celui pour lequel mes sens brillent.
Ainsi, j’élève avec ma femme une cinquantaine de bovins Highland Catte. Ce que je peux vous dire est qu’au sein de nos vies, règnent la paix, le pardon, l’amour et la reconnaissance. Car nous avons appris que c’est cela qui rend heureux et permet d’être serein, véritablement serein.
Car l’argent n’achète pas tout et que c’est même généralement en offrant que l’on cultive le mérite, et non le contraire.
En attendant, la vie passe. Et elle est belle. Car elle est pleine d’enseignements et de perspectives. Une rencontre pourrait tout changer, tout améliorer. Et en cela, elle est pleine de surprises.
Hier, nous sommes partis visiter une exposition sur les poils à laquelle les dreads de nos cornues étaient conviées. Nous avions en effet posté tout un carton de ces précieux entrelacs. Ce fut une après midi magique qui nous apporta beaucoup de bon repos. Et nous les remercions au passage 🙂
Aussi, ici, peu à peu, les choses changent. D’un élevage uniquement destiné à la vente de viande, depuis un an et demi, nos ventes de Highland Cattle sur pieds dépassent nos ventes de viande. Dans la même vision, notre ferme prend le chemin de devenir un centre d’animations, d’accueil, de formation et de bien-être. Et nous en sommes ravis. Car cette voie qui s’offre à nous, ce chemin que nous prenons, nous comble de bonheur. Alors continuons !
Vous savez, pour ma part, je ne m’informe pas du monde via une télévision ou un ordinateur. Je laisse en effet aux arbres et à nos Highland Cattle -notamment- l’enseignement de nous pousser d’avantage à être meilleurs et à nous ouvrir à la perspective qu’un monde en paix est tout à fait possible. Je trouve simplement que le monde manque d’alternatives à cette société dans laquelle, pourtant, nous nous sentons intégrés.
Il me semble ainsi qu’à notre échelle, la meilleure solution est de proposer une autre vision, d’autres perspectives où chacun y trouverait d’avantage la place de son épanouissement.
C’est à chacun de voir et de choisir. Car l’avenir ne dépendra uniquement de ce que nous en feront, ni plus ni moins.
Et qu’ainsi, tant qu’à être ici, autant tout faire pour développer le bonheur. C’est une recette simple, et j’ai toujours aimé la cuisine car elle offre de merveilleux partages en perspectives.
Toute mon enfance, d’avantage encore à l’adolescence, et parfois de manière déraisonnable à l’âge pré-adulte, j’étais en quette d’un monde de paix, où l’harmonie et le bonheur se cueilleraient telle une jonquille annonçant les jours lumineux.
Tout comme le Philémon de Fred, une foi surnaturelle en un monde meilleur trônait fièrement au plus profond de moi-même, prenant même quelques fois des airs fougueux d’utopies.
Si je tourne mon esprit vers ces périodes passées, sans mélancolie aucune, une citation de ce grand Hugo me vient en tête. “L’utopie d’aujourd’hui est la réalité de demain” disait il.
A l’instant même, bercé par Wagner, je repensais à tout cela.
Je pris alors conscience que cette recherche avait pris fin au cours de l’année 2014. Année, où, avec Wendy, nous recevions nos Highland Cattle. Débutant avec seulement 8 vaches reproductrices suitées, tel un paysan d’un autre siècle, c’est aujourd’hui 56 amies qui peuplent mes prairies.
Tel un homme ayant suffisamment de recul pour narrer son histoire, chacune a sa personnalité. De Néoinéan la chef de sécu à Moïra la craintive, en passant par Laluinn la fragile, Pâquerette la nounou, Sylvaine la téméraire, Scottish la clown, Caileag la douce championne, ou encore Oscar la force tranquille ou Moo Capleadh la mamie hardie, chacune porte en elle son histoire, ses humeurs, ses joies, ses craintes, ses affinités, ses désaccords et les expriment par leur présence tout comme un poète met à disposition son coeur par ses illustres récits.
Ainsi, l’année 2014 mis fin à mes songeries utopiques. Manque de temps ? Trop préoccupé ? Finalement cartésien ? Oh que non, bien au contraire. Ce qui me semble aujourd’hui limpide est la concrétisation, la manifestation de mes aspirations. Pourtant, mon quotidien, même si sa gestion est volontairement simple, demeure ô combien prenant et sans relâche. Mais un monde où la facilité serait offerte permettrait il le bonheur ? En réalité non, je ne le pense pas. Être éleveur apprend le courage, la tempérance, la persévérance, la bienveillance, la responsabilité. Mais aussi le lâcher prise, l’acceptation, et l’humilité étroitement liée à un charisme certain.
Un doux rêve d’enfant peut en réalité devenir bien plus vaste et complexe qu’une simple volonté de bonheur. Mais après tout, n’est ce pas la si large biodiversité qui crée la beauté remarquable et si harmonieuse de ce monde ? Et toutes les étoiles et planètes plus nombreuses encore que le nombre de grains de sable sur Terre n’ont elles pas comme origine le big bang, de la taille d’un pamplemousse ? Si si, il parait bien.
Mais alors où sont passés les songes ? Les douces rêveries ? Les grands discours le poing sur la table et le verre de l’autre main ?
Ils sont ici, ils sont là. Si je regarde l’oeil de mon taureau je les vois. Si j’écoute Bheadareachd meugler de toutes ses forces, je les entends. Si je flaire le cuir de Myra Dohn, je les hume. Si je caresse notre nouveau né Cernunnos, je les sens. Si je mâche un morceau de hampe, je les goûte. Si je m’assois parmi elles, je ressens leur présence.
Mon rêve peuple alors mon monde tel un Dieu pour les croyants, telle la poésie pour les amoureux et tel le bonheur pour les bienheureux.
Alors, conscientisant cela, je me retrouve comme Philémon sur sa lettre A. Comment suis-je arriver là ? Non, ce n’est pas la bonne question. Car c’est elles qui sont venues à moi. Un mercredi, à 2h00 du matin. Wendy pourra également vous le dire ; de les voir à travers les grilles du 38 tonnes, elle tomba amoureuse et guérit en un éclair ses rudes blessures émotionnelles. Cela tient il du miracle ? Peut-être. Sûrement même, rajouterais-je. Du moins, j’y crois. Et n’est ce pas la croyance qui est source de tout rêve, de tout amour, de tout lien possible ? Si, et le temps forme la félicité de tout cet ensemble cohérent. Voilà, oui, je pense être certain de cela.
Voilà maintenant six ans que nous sommes éleveurs de Highland Cattle à St Rivoal.
Nous tenons en premier lieu à remercier toutes celles et tous ceux qui croient en nous et qui nous aident jour après jour à développer nos activités, durablement.
C’est ainsi, dans une volonté de réaliser un autre rêve, que nous avons reçu dix huit Highland Cattle par une douce nuit de 2014.
Si je suis un agriculteur très formé grâce à un bac+3 en agro-écologie, je dois reconnaître que, dans la pratique, c’est surtout en compagnie de ma femme, Wendy, et de nos animaux, que nous avons fait les bons choix.
Comme nous le disons souvent, nous faisons ce que nous aimons, tout simplement. Et s’il y a quelque chose que nous “ne sentons pas”, nous ne le faisons pas.
Lao Tseu a dit un jour : “Il n’y a pas de chemin vers le bonheur. Le bonheur est le chemin.” Je trouve que cette phrase a beaucoup de sens. Car le bonheur est une boussole fiable.
Nous avons donc choisi la plus belle race de bovins qui soit, nous nous sommes installés dans l’une des plus belles régions que nous connaissions car cela nous plaisait et nous enchante toujours ô combien chaque jour.
Vous le savez, il existe une corrélation entre qualité de vie et bonheur. Et ainsi, si la qualité de vie dépend du bonheur, le bonheur, lui aussi, dépend de la qualité de vie.
Aussi, nous savons et constatons que le bonheur se multiplie lorsqu’il est savouré et partagé avec celles et ceux que l’on aime.
Et qu’ainsi, la vie a vraiment plus de sens.
Voici ce que je peux vous dire sur la profession d’éleveur-se. Car je suis convaincu que quelque soit la manière dont on la nomme, la passion du métier est l’âme même qui nous unie toutes et tous, paysan-nes, entre nous, à vous, à nos animaux, à nos cultures, au Ciel et à la Terre.
Puissent tous les paysan-nes être pleinement récompensé-es de nourrir les Hommes.
Et puissent tous les Hommes être en paix et heureux.
La semaine dernière, j’eus une discussion avec une amie d’enfance. Celle-ci m’a beaucoup touché et c’est après quelques jours de réflexion que j’ai enfin réuni les mots justes pour lui répondre.
Étant donné que les sujets principaux de cette discussion furent l’ambition, la réussite socio-professionnelle et la capacité d’adaptation à un groupe, il me tient à coeur de vous exprimer, à vous également, cher-es adeptes, mon point de vue.
En effet, c’est grâce à ma situation socio-professionnelle d’éleveur, de paysan, que je souhaite ouvrir les esprits car pour beaucoup, nous, agriculteurs, sommes “en bas de l’échelle”.
Si cette dernière phrase ne vous convient guère ou que vous la trouvez inappropriée, je vous prierais dans ce cas de bien vous rappeler que, selon la MSA, 50 % des éleveurs gagnent moins de 370 € par mois, que nous sommes les plus concernés par les burn-outs, qu’un agriculteur français se suicide tous les deux jours, et que cela n’a l’air de choquer personne, exceptée la Confédération Paysanne. Ainsi, si à part ce syndicat, aucune action n’est engagée dans le bon sens qui est la véritable reconnaissance de la détresse de la majorité des agriculteurs, et bien dans ce cas oui, il va de soi que l’on peut affirmer que nous, les agriculteurs, somme bien en bas de l’échelle.
Mon amie, qui a grandi dans un quartier similaire au mien, semble y avoir eu de mauvais souvenirs. Car il s’agit d’un quartier HLM et que pour tenir ses propos, elle voudrait devenir “milliardaire et élite de cette société”.
Cependant, mademoiselle est actuellement SMICarde mais vient de réaliser son plus grand rêve ; rejoindre une organisation dite “philosophique” très célèbre puisque celle-ci regroupe les “puissants” de ce monde. Ainsi, bien plus qu’une aubaine, elle voit cette intégration comme la porte d’entrée vers un monde qui serait “élitiste” et idyllique…
Et qu’ainsi, d’un autre côté, pour ne pas dire à son opposé, voici maintenant plus de 30 ans que j’ai fait voeux de devenir paysan, profession que j’exerce dans une sincère réalisation de ma personne depuis maintenant 5 ans.
Et dans le même contexte, je pense avoir une certaine idée sur l’art de philosopher, de ses définitions, de ses objectifs et de sa méthodologie.
Ainsi, elle m’explique : “Il nous est demandé de ne pas avoir de ressenti et toujours de respecter une certaine façon de parler”.
Si le mot “élitiste” m’a profondément choqué car il suppose que certains Hommes seraient meilleurs que d’autres, c’est dans un bien premier plan que “ne pas avoir de ressenti” m’a, lui, bouleversé.
Car il me semble que le ressenti est la première expression de chaque être, qu’il est le pilier central même des émotions et qu’il s’apparente même à, ce que les dits sages appellent, l’âme. Et que par voie de fait, vouloir inhiber voire supprimer entièrement ses propres ressentis n’aboutit qu’à une voie ; celle de la démesure et de l’égarement. Car si le ressenti permet justement de jauger et de juger, il est le siège même de toutes nos valeurs, morales notamment, qui nous informent donc de ce qui est bien ou mal.
Et qu’ayant dans mon curriculum vitae, une expérience de commercial de trois semaines, je vous avoue qu’à moi aussi, on m’avait demandé, à cette époque, de ne pas avoir de ressenti… Cela semble être ainsi très fréquent dans le milieu des affaires de demander une telle promesse.
Sans aboutir à une synthèse qui ferait de certains des héros et d’autres des personnes malsaines, je mentionnerais juste le fait que d’une, le monde actuel connait une grande agonie, et que de deux, l’état catastrophique de celui-ci est le fruit des agissements de plusieurs.
Et qu’ainsi, s’il est clair que toute personne est bien dotée de conscience, supprimer ses ressentis est une véritable porte ouverte à des agissements graves voire immoraux car aveuglés. Et de la même manière, agir de la sorte pour pouvoir accumuler des biens et services peut engendrer une grande confusion entre ce qui est bien ou mal, parce que plus nous agirons immoralement, plus nous penserons être comblés.
Et par conséquent, si telle est la voie pour faire de certains des élitistes et des milliardaires, je soulignerais tout de même que ceux-ci, soit ne sont pas nés en HLM, soit ont eu une idée de génie. Et que l’on se réveille pas un matin en se disant “Tiens, aujourd’hui, je vais avoir une idée de génie.” Celle-ci est plus liée au fruit du hasard telle la pomme qui tombe sur Newton comme l’a si bien illustré Gotlib…
Vous savez, ma volonté incommensurable de devenir éleveur est née de mon attachement à mon ours en peluche, à mon amour pour les animaux, à mon choix de prendre soin de la Terre, à mon sens gastronomique et enfin à la détermination de servir le monde sous une noble cause. Et je peux vous assurer que, même si cela ne fait que cinq ans que nous sommes installés, jamais je n’aurais imaginé avoir un tel succès, fruit de vos dires, de vos commentaires, de votre participation et surtout des étoiles que vous avez dans les yeux à chaque livraison de nos mets.
Et que pour moi, telle est la réussite. Car elle nous montre et nous démontre que ce que nous faisons est juste, qu’elle exprime, au delà de nos attentes, une certaine idée de notre vrai potentiel, et qu’elle répond clairement aux nouvelles attentes du monde qui est de produire des produits de qualité remarquable, de respecter l’Homme, la nature et soi-même.
Et si pour beaucoup l’ultime sacerdoce de tout Homme est de devenir milliardaire, c’est le sourire aux lèvres et en toute sincérité que je refuserais un si grand butin. Car je n’en ai ni l’envie, ni le besoin et que mes valeurs sont toutes autres.
Hier, je marchais parmi notre troupeau reproducteur. Épanoui et ravi d’être là, je pris le cou de mon taureau entre les bras et restais là quelques temps. Oscar ne bougeait plus lui non plus, nous profitions. Son odeur, sa chaleur, le toucher de sa crinière, tout ce ressenti (!) me transportait, me submergeait, comme une vague de bonheur ici, parmi mes Highlands Cattle.
La semaine dernière, j’aidais ma vache préférée, Caileag, surnommée “ma grosse zonzon” à mettre au monde un veau d’une rare beauté. La difficulté de ce vêlage et notre attachement à Caileag nous firent pleurer de joie lorsque l’on se rendit compte que Belun, son veau, était vivant ! Le même jour, je trayais Morag pour donner à boire à son petit. Pouvez vous ne serait ce qu’imaginer la grâce de goûter le lait encore chaud, trait à la main, et au goût si ample, d’une grande amie qui a partagé tant de moments intimement précieux ?
Et tu me dis qu’il faut bannir ses ressentis contre de l’or ?
Mais ma pauvre amie, que feras tu de cet or ? Que t’apportera t il, lui ? Et qu’apportera t il au monde ? Comme le chante Ridan “Je préfère vivre pauvre avec mon âme que de vivre riche avec la leurs”.
Tu me dis aussi qu’il faut, dans tes groupes dits “philosophiques” toujours utiliser un langage convenable. Quelle est donc, encore une fois, cette usurpation de ce si bel art qui justement apporte, lui aussi, la liberté ?
Moi, je te dis, que lorsque tu te bats jour et nuit, avec moins de douze jours de repos par an, pour que tes Highlands Cattle puissent être les plus heureuses possibles et qu’en changement de champs, elles te suivent sur des kilomètres, et que tu te retrouves devant, leader, avec 30 bovins de 600 kg avec des cornes qui font pâlir le plus grand nombre, ben à part “Whaou”, la petite larme à l’oeil ou prendre une photo fièrement, t’as envie de dire “Mais bordel, mais c’est énorme ! C’est un truc de ouf !!!!”
Je t’aime tu sais, ne confond pas rêves, utopie et folie des grandeurs. Car si pour Hugo, “L’utopie d’aujourd’hui est la réalité de demain”, la folie des grandeurs, elle, te perdra. Et que, trop fière sur ton trône, tu n’auras plus personne pour te tendre la main et te réapprendre à ressentir ces toutes petites choses simples qui composent la vie, dont nous ne soupçonnons que si peu la réelle grandeur.
J’ai toujours aimé la connaissance. La connaissance et les animaux. A l’école Freinet déjà, la majorité de mes exposés concernait la vie de nos amis non-humains.
C’est ainsi le coeur ouvert que j’expliquais à mes camarades la vie des bisons, des gorilles, des loups, des chevaux… Je me sentais vraiment à ma place dans cette fabuleuse école.
L’équitation et le lien à la nature au sens large m’ont orienté vers un bac intitulé agronomie et environnement.
J’ignorais à l’époque réellement ce qu’était l’agronomie. Et je ne suis pas certain que d’apprendre des listes interminables de noms de produits phytosanitaires puisse répondre à une quelconque connaissance agronomique.
Je me trouvais dans un lycée dit de grande réputation. Pourtant je n’étais pas à ma place, du moins c’est ce qu’il me semblait. Mais je compris 15 ans plus tard que si, en fait. Qu’il faut parfois connaître le monde tel qu’il est pour en construire un nouveau.
Puis je poursuivis mes études avec un BTS en productions animales. Nos professeurs étaient si fiers de nous venter que ce BTS était le plus dur. Ça oui, il fut dur, très dur même mais pas au sens où ils l’entendaient.
Entre étudier le “bien-être animal” d’une truie enfermée en cage ne pouvant uniquement que se lever et manger, sans mouvoir, apprendre à castrer à vif “parce que ça compte pour l’examen”, savoir bien tenir un veau de 2 mois pendant qu’on l’écorne au fer rouge, disséquer une quantité invraisemblable de cadavres encore chauds ou encore tenter de comprendre le lien ville-campagne dans une salle de classe … tout cela me dépassait complètement. Car on ne m’avait, à moi, jamais appris à me tenir lorsque je tiens un veau que l’on torture. Car au vu de ses hurlements et de la manière dont il se débattait puis tremblait, je trouve que le terme est tout à fait approprié. Et le tout à 10 mètres de sa mère. “Oh elle finira bien par se taire…”
Je crois honnêtement que durant ces cinq années, j’étais dans un état émotionnel proche de ces animaux en cage.
En cage oui, car l’enjeu était immense de la part des formateurs ; il fallait qu’ils nous apprennent à répondre aux directives agricoles datant de 1957 et surtout de pouvoir payer des tracteurs aux prix d’une belle villa… Et cela semblait être si important aux yeux de tous.
Le premier jour de ce BTS, notre professeur d’économie et professeur principal nous présenta un texte, bien écrit il est vrai, mais d’une nature assez, comment dire, limitatrice. En résumé, ce document stipulait qu’un agriculteur ne pouvait se passer des OGM, des pesticides et de toute l’idéologie dite “productiviste”. Le professeur finit son cours en humiliant “les paysans aux chapeaux de paille”. J’avais une toute autre vision de la chrétienté, cela bouleversait même ma foi car ce lycée était catholique. Je ne comprends toujours pas d’ailleurs.
J’obtins, malgré tout, ces diplômes avec mentions. Même si je m’étais totalement planté à la castration de ce pauvre porcelet.
On eut, durant ces années lycées, 2 jours de formations sur les agricultures dites alternatives. Parmi celles-ci se trouvait l’agriculture “raisonnée”, à croire que tout le reste de ces cinq très longues années ne l’était pas. A noter tout de même que le terme “d’agriculture raisonnée” a été inventé par des fabricants de produits phytosanitaires, mais ce n’est qu’une parenthèse. On nous expliqua en deux heures environ ce qu’était le label rouge, l’agriculture paysanne et l’agriculture biologique.
Ce que je peux vous en dire est que ces quelques heures furent les seuls moments où je pus respirer, sourire et avoir de l’espoir.
Qu’est ce que je faisais là bas ? C’est un de mes profs qui me le révéla il y a tout juste deux ans. Il venait cette fois me rencontrer en tant que maître de stage, stagiaire que je salue au passage 😉
Après l’avoir écouté 20 minutes prétendant, à tord, que le plan écophyto est une réussite, mon ancien professeur me dit : “Ben au moins tu as su ce que tu ne voulais pas faire.”
A quoi je répondis : “Tu sais, moi j’attends pas de mes clients qu’ils deviennent vegans”.
Mon deuxième BTS en Gestion et Protection de la Nature puis mon CS Conseiller en Agriculture Biologique m’appris cette fois qu’il existe bel et bien d’autres agricultures, d’autres façons de faire qui, il me semble sont bien plus catholiques… Car nous autres, “les bios” ne faisons que honorer la Terre et l’ensemble de ses composants, en produisant de la nourriture où le mot qualité a réellement sa place. Que nous sommes convaincus, comme Gandhi l’était, que c’est uniquement par la bienveillance que l’on fait avancer les choses. Et qu’il est plus que temps que les choses changent.
Aux dires des stagiaires que nous recevons, peu de choses ont changé dans ces écoles. Et vous, vous êtes pour ou contre le changement ?
Depuis mon enfance, j’ai toujours rêvé d’être un paysan. Lorsque j’aidais ma mamie à traire ses Frisonnes dans une crèche faite de pierres, lorsque j’écoutais mon papy chanter des louanges à Marie dans son tracteur, je ne voyais pas mon futur différent. Ce contact à la Terre et au Ciel m’inspirait le goût du juste, les trames de valeurs nobles, ou chaque attitude déplacée était rigoureusement remise dans une droiture faite d’amour mais aussi de pardon.
Ne croyez pas pour autant qu’ils étaient durs. Non. Leurs coeurs étaient grands et ils savaient rire de choses simples.
Le monde tel qu’ils me le présentaient était composé d’une délicate magie par laquelle contempler un troupeau, écouter le feu chanter, regarder nager des têtards dans un lavoir, caresser Charly -le chat- ou encore suivre les vaches à pieds triomphaient de la monotonie d’un jeu vidéo, d’une émission de télévision ou de longs trajets en voiture.
La semaine dernière, un de mes amis, éleveur, me tenait un tout autre discours. Il me disait qu’il lui était difficile de développer une sérénité stable car nos esprits sont constamment en questionnement sur ce qui composera notre futur d’un côté, et paradoxalement sur l’emprise qu’a le virtuel sur nos vies.
Il y a deux jours, je me révoltais publiquement du sort réservé à la majorité de ceux qui osent prendre soin de la Terre.
Si pour moi, nous sommes les premiers responsables du temps que l’on passe devant nos ordinateurs, nous sommes également tous responsables du sort que subit actuellement d’une l’humanité et de deux, celui très critique que l’on octroie à la Nature et ses vastes composants.
Car tout est une question de choix.
Et que c’est l’Homme qui appartient à la Nature et non le contraire.
Si j’ai eu demandé le RSA à une certaine époque, j’ai toujours consommé des produits issus de l’agriculture biologique à + de 90 %, quelques soient la période et mes finances.
Vous savez, Wendy et moi sommes très fiers de nos choix. Et malgré tout ce que nous ayons connus ensemble, jamais nous ne nous sommes vus reconsidérer notre vie professionnelle. Car elle nous apporte le lien au vivant que nous sommes, que … tenir 24 heures sans voir son troupeau est pire qu’un sevrage tabagiste, et que l’idée d’imaginer son troupeau vendu à quelqu’un d’autre vous briserait d’avantage le coeur que le départ de votre amoureux-se sur le quai d’une gare.
La semaine dernière, ayant besoin d’air, nous partions voir la mer. Direction Camaret. Tenant d’une main mon épouse et de l’autre le bâton de la Toone, notre chien, une idée me traversa l’esprit.
La voici. Le monde connait actuellement un changement qu’aucune génération, qu’aucun peuple n’a connu auparavant. Les scientifiques nous disent que tout est dans le rouge et les sages nous disent que nous vivons l’apocalypse. Seuls 5 % de la population semblent s’éclater à coup de délires égotiques, pendant que les autres sont opprimés pour ne pas dire anéantis.
L’idée qui m’est venu est que nous, agro-écologistes, paysans bio, paysans amoureux de la Terre de tous pays sommes les pionniers de ce que l’avenir pourrait être fait si l’avenir il y en a un. Et oui, il en existera un. Et non, il ne sera pas virtuel. Car la magie de la Nature éveille en nous l’être véritable que nous sommes. Que la marche est déjà entamée et qu’elle ne cessera point devant des boucliers, des matraques, des subventions languissantes, ou de futures promesses électorales.
Et qu’ainsi, oui, un jour, nous serons reconnus. Que le peuple reconnaîtra d’avantage le mérite de prendre soin de la Terre, de nourrir ses semblables et d’aimer ses animaux, que celui de se pavaner dans des magazines tendance, d’avoir une fortune de couleur rouge sang, que celui de frimer avec des chaussures conçues par des enfants, que de se rafraichir avec des boisson causant l’obésité, ou de s’identifier à des escrocs sans foi ni morale.
Car nous valons tous, ô combien, bien mieux que tout cela.
Et car je me répète, tout est une question de choix, et quelques fois de remise dans une droiture faite d’amour mais aussi de pardon.
Amis consommateurs, nous comptons sur chacun d’entre vous. Par vos achats, vous êtes la clef de ce monde.
Et celui-ci peut, selon vos souhaits, s’embellir d’avantage, encore et encore.
Le jour où nos Highlands Cattle nous ont rejoints sur St Rivoal, je les accueillies avec un réel honneur.
La première fois que j’en ai vu, c’était dans un livre. Béni soit ce jour. Leur look m’a tout de suite inspiré le respect et la sympathie. Il me semble qu’un être aussi beau, ayant tant de charisme et dont la ressemblance de ses descendants aux nounours est si flagrante, ne peut être que respecté et aimé de tous.
Dans ce monde, rares sont les êtres et les objets pour lesquels tous s’accordent à les reconnaitre comme beaux. Les quelques objets d’art répondant à ce critère sont précieusement gardés et n’ont même pas de prix. Car leur en donner un, même exorbitant, serait une offense à leur réelle valeur.
Et nos amies Highlands Cattle, même celles avec des cornes tordues, font parties de ce rang.
Elles sont le reflet de l’âme écossaise. De ce noble pays au peuple si beau et si accueillant. Leurs cornes et leur charisme nous rappellent que même Jules César avait perdu toutes ses batailles contre les écossais. Leurs longues robes nous font écho au rude mais poétique climat de la région des Highlands. Leurs couleurs variées et leur si grand amour nous soulignent l’ouverture d’esprit du peuple celte. Leur rusticité nous confirme que l’âme celte est ô combien vivante pour ceux qui souhaitent l’élever. Enfin, la qualité de leur lait et de leur viande nous impose un hommage immédiat.
Reconnaissant tout cela et leur ouvrant les portes du semi-remorque qui menait au champ “d’arrivée”, je ne pouvais que m’incliner comme le font les disciples envers leurs maîtres.
Les discernant au visu en un éclair et à la voix, cela va de soi, elles sont vite devenues mes amies, mes “tites chéries”, mes protégées, ma famille, ma tribu, mon clan.
Par la patience, nous avons su rendre dociles les plus téméraires. Par la persévérance, nous leurs avons appris à respecter les clôtures. Et tous les jours, nous leurs exprimons notre gratitude.
Si l’Homme souffre d’égoïsme car il n’est tourné que sur lui, ici, mon regard se porte vers elles. Elles sont l’espoir qui me lie à la vie, elles sont l’amour que je souhaite aux autres, elles me font rire plus que quiconque et me font rêver de mes prochaines réincarnations.
Si les visites au sein de notre élevage sont extra-ordinaires, si nos paroles sont porteuses de passion, et si mes écrits sont tant appréciés, c’est parce que je ne vous parle que d’elles ; les Highlands Cattle.
Et si mon amour envers elles est si fort, c’est à ma maman que je le dois. Car c’est elle qui, en premier lieu, m’a appris à aimer.
Je suis né avec une grande sensibilité, c’est ainsi
Lorsque je suis avec quelqu’un qui souffre, je souffre aussi
Lorsqu’un événement terrorise la nation, je suis également terrorisé même si je n’en connais pas encore la cause
N’ayant pourtant pas de week-end, le vendredi soir je me sens ivre de joie et j’ai envie de sauter partout
Cette nuit, je ressens, pire que dimanche dernier, une grande tension, je me sens énervé et j’ai terriblement mal au ventre. Tout cela m’empêche de dormir
Pas besoin de chercher bien loin, c’est la rentrée ; celle des adultes et des enfants
Je me pose alors la question suivante : Quel est ce monde qui contraint tant la liberté et l’épanouissement de son peuple à en avoir mal au ventre ?
A cela, je voudrai apporter mon point de vue
Éleveur des célèbres vaches aux cornes + longues qu’un bras, j’ai délibérément choisi mon métier, ma vocation. Je n’ai en réalité que suivi mes rêves d’enfances ; devenir un cow-boy avec des veaux ayant une forte ressemblance à Grosille, mon ours en peluche et posséder un tracteur. Mais aussi, vivre naturellement, prendre son temps, tout gérer de A à Z avec mon épouse et enfin produire une alimentation saine, délicate et immensément savoureuse. C’était mon rêve, c’est aujourd’hui ma profession
Aussi, je n’ai pas choisi ni un travail facile, ô non, ni un travail proche des 35 h et encore moins des 5 semaines de congés payés.
Pourtant, je n’ai jamais, ô grand jamais, été aussi heureux, épanoui, fier de moi, déterminé et convaincu d’avoir choisi “ma voie”
Ayant été longtemps salarié dans de nombreux domaines, j’ai aujourd’hui une vue totalement différente du travail, du temps, de l’argent et de la vie en général
Et dans quelques heures c’est la rentrée
J’ai connu cela ; le soleil, la mer, la tente, le rhum, le p’tit déj sur la table pliante, les randonnées, les longues nuits en voitures, les amourettes aussi. Je crois que mon meilleur souvenir reste le bruit que fait la fermeture éclaire de la tente, loin devant la piscine du camping
Or voilà que l’été s’achève peu à peu
Et pour beaucoup, l’ivresse du bronzage grandissant pâlit presque instantanément à la vue du travail qui recommence
Soins aux animaux, récoltes et travail des champs “obligent”, j’ai eu en tout 4 jours de libre cet été
Vous croyez que je vais me plaindre ? Bien au contraire, je vais citer ce cher Confucius qui disait “Choisi le travail que tu aimes et tu n’auras plus jamais à travailler de ta vie”
Votre place est là où vous êtes heureux, choisissez bien cet endroit
Excellente rentrée à toutes et à tous
Bon courage, surtout

Textes : Ronan Caraës